La difficile prise en considération des mythes pédagogiques
Les mythes éducatifs et les conceptions erronées sur l'apprentissage sont l’un des principaux facteurs qui font obstacle à l’amélioration en éducation.
Pour un enseignant, fonder ses pratiques et orientations pédagogiques sur des sources de preuves anecdotiques (croyances, expériences isolées) plutôt que scientifiques peut s’associer à des résultats qui vont à l’encontre de l’éducation fondée sur les preuves. C’est susceptible d’amener à des approches contreproductives pour l’apprentissage des élèves.
Chez des enseignants en formation initiale, l’existence de conceptions erronées sur l’apprentissage ou l’enseignement, contraires à certains apports de la psychologie de l’éducation est potentiellement néfaste. Cela peut constituer une menace pour la pleine atteinte des objectifs éducatifs concernant les élèves.
La problématique peut se manifester à trois niveaux :
Les conceptions erronées en psychologie de l’éducation chez les enseignants en formation initiale sont désavantageuses pour leur propre apprentissage :
Elles peuvent entraver l’acquisition de nouvelles connaissances fondées sur des données probantes.
Les enseignants risquent de les diffuser auprès d’élèves ou de collègues.
Les enseignants peuvent ne pas utiliser des connaissances fondées sur des données probantes pour concevoir leurs propres cours.
Les conceptions erronées en psychologie de l’éducation des enseignants peuvent avoir des conséquences négatives pour le développement et l’apprentissage des élèves :
De nombreuses situations dans lesquelles les conceptions erronées sont mobilisées peuvent conduire à des occasions manquées de faciliter l’apprentissage ou d’améliorer les résultats des élèves.
Par exemple, le fait de nier l’effet du test et de mobiliser dans sa pratique des neuromythes comme les préceptes liés aux styles d’apprentissage peut limiter l’efficacité de l’enseignement. Le même risque existe sur le fait d’avoir une opinion favorable sur les intelligences multiples en décalage avec l’état actuel de la recherche et tenter de l’intégrer dans ses pratiques. L’enseignement prodigué peut différer de celui d’enseignants qui intègrent des apports de l’éducation fondée sur des données probantes.
Les conceptions erronées en psychologie de l’éducation ne sont pas seulement un obstacle pour une seule personne.
Elles peuvent également avoir un impact négatif sur la société.
Les enseignants forment un groupe ayant une influence particulière sur de nombreux apprenants.
Si les enseignants s’appuient sur des conceptions erronées sur des sujets liés au contexte éducatif, la portée de leur influence négative peut être importante.
Les enseignants peuvent avoir un impact sur de nombreuses générations d’élèves tout au long de leur carrière. Les enseignants agiront dès lors en tant que distributeurs de connaissances erronées sur l’apprentissage.
Pour ces différentes raisons, atténuer leurs conceptions erronées en psychologie de l’éducation des enseignants devrait être une priorité en formation initiale et continuée.
Les conceptions erronées des enseignants concernant le contexte éducatif constituent un facteur défavorable pour une pratique éducative de qualité. Elles peuvent entraver l’apprentissage et constituer une mauvaise utilisation de ressources précieuses pour l’éducation.
Certaines conceptions erronées sur l'éducation que possèdent des enseignants correspondent à des mythes éducatifs ou neuromythes sur l'apprentissages.
La plus grand difficulté avec mythes éducatifs est que les personnes qui y croient seront souvent capables de trouver suffisamment de preuves anecdotiques dans leur pratique quotidienne pour étayer leurs convictions. Ils se passent aisément de l'absence de soutien de la recherche à leur idées.
Pedro de Bruyckere et ses collègues (2015) développent trois raisons pour expliquer la persistance et la résistance au changement de certaines de ces conceptions erronées sur l'apprentissage ou l'éducation :
La structuration :
Pour les êtres humains, il existe une tendance à se rassurer en trouvant des modèles significatifs dans un bruit aléatoire.
Dans sa pratique, la personne va mettre en évidence les moments où le mythe pédagogique semble avoir un effet positif et ignorer sciemment tous les autres, ce qui donne une vision complètement faussée.
Cette structuration tend à maintenir les conceptions erronées correspondantes.
Le biais de confirmation :
Nous avons tendance naturellement à rechercher spécifiquement des preuves qui confirment ce ce que nous croyons déjà et à ignorer ce les informations qui nous font nous remettre en question.
Une personne va lire systématiquement des ressources qui vont dans le sens du mythe pédagogique auquel elle adhère et avoir plus spécifiquement des échanges avec des personnes adhèrent à sa vision.
Tout ce qui ne va pas dans le même sens est ignoré et tend à être rejeté. Tout discours contraire est remis en question, ou souvent qualifié de provocateur.
Le biais rétrospectif :
Nous avons tendance à établir des explications et des justifications là où il n'y en a pas..
Le biais rétrospectif consiste en une erreur de jugement cognitif désignant la tendance qu’ont les personnes à surestimer rétrospectivement le fait que des événements donnés auraient pu être anticipés moyennant davantage de prévoyance ou de clairvoyance. Il s’agit d’un mécanisme de déni du hasard.
Avec le biais rétrospectif, tout événement doit pouvoir se justifier afin d’être le plus prévisible possible, sa fonction étant dès lors de conforter les individus dans leur sentiment de contrôler l’incertitude. Les conceptions erronées semblent apporter des explications à des phénomènes alors que ce n'est pas le cas, ce qui augmente leur résistance au changement.
Lorsque nous voulons remettre en question des conceptions erronées ou des mythes en éducation, il est essentiel, de faire référence à des sources scientifiques qui se fondent sur quelque chose de plus qu’une que des expérience personnelles subjectives ou des récits empruntés à d'autres. Le preuve scientifique permet d'échapper au biais, ce qui n'est pas le cas des expériences qualitatives partagées.