L’impuissance apprise de l’enseignant face aux commentaires liés aux évaluations
Les élèves réalisent des devoirs et d’autres productions individuellement. Ils s’engagent dans des évaluations formatives et sommatives.
De l’autre côté, l’enseignant les récupère et leur attribue généralement une note chiffrée agrémentée de l’un ou l’autre commentaire individuel, justifiant le résultat, soulignant des manquements et offrant quelques pistes, dans la mesure du possible. Souvent, l’enseignant va également se consacrer à un temps de correction en classe avec ses élèves.
Ce travail de correction demande un investissement en temps conséquent pour l’enseignant. Il répond à des obligations administratives explicites ou implicites. La difficulté est que le retour sur investissement est aléatoire.
À travers ce processus, les enseignants espèrent alors que leurs élèves s’amélioreront d’une manière ou d’une autre, d’ici à ce que leur prochaine évaluation ou une nouvelle production arrive. Celle-ci aura généralement lieu une, deux, trois ou quatre semaines plus tard, suivant le volume horaire.
Régulièrement, le bénéfice escompté ne se traduit que peu. Les enseignants réprimandent alors l’élève qui récidive avec le même style d’erreur ou de manquement, avec tout de même généralement une certaine amélioration aléatoire.
D’une manière générale, l’enseignant est susceptible de passer plus de temps sur l’observation du travail de l’élève que celui-ci n’en passera lui-même par la suite. Il prend ses responsabilités, mais ses élèves ne lui rendent pas systématiquement la pareille. Parfois même lorsque l’évaluation est formative, leurs efforts sont limités.
L’idée derrière le principe « d’activation des élèves comme détenteurs de leurs propres apprentissages » issu du modèle de l’évaluation formative de Dylan Wiliam, est d’échapper à ce type d’impasse.
La principale faille du système prend naissance dans le fatalisme dont l’enseignant peut faire preuve dans ce genre de situation. Le manque de réactivité d’une part non négligeable de ses élèves, même si cela l’incommode, lui semble inéluctable. Il y a chez l’enseignant une forme de résignation, d’impuissance, apprise ou acquise.
Elle correspond à une perte de confiance en ses capacités à réussir en mobilisant ses efforts à la suite d’échecs répétés ou à une absence de retour sur investissement. Souvent, les enseignants font moins d’évaluations formatives ou moins de commentaires et se limitent au strict minimum. Le résultat est que le bénéfice de l’évaluation formative disparait encore plus.
L’enseignant semble se résigner à des attentes faibles quant à ce que bon nombre d’élèves soient prêts à agir pleinement au retour qu’il leur offre individuellement. Il a passé un temps conséquent à corriger et commenter un travail qui finira pour certains au fond du cartable.
Un changement de paradigme s’impose, qui implique de passer de la vision d’une rétroaction comme charge de travail pour l’enseignant à celle d’une difficulté désirable pour l’élève.