Passer de la vision d’une rétroaction comme charge de travail pour l’enseignant à celle d’une difficulté désirable pour l’élève
Traditionnellement, la rétroaction est perçue comme une charge de travail pour l’enseignant amené à justifier le résultat de ses élèves. Pour sortir de cette impasse dont la valeur est pauvre pour l’apprentissage des élèves, nous devons déplacer le centre de gravité de la rétroaction de l’enseignant vers l’élève.
Dès lors, il ne s’agit plus pour l’enseignant de faire « la bonne chose » et de respecter les prescriptions administratives. Les traces laissées par l’enseignant ne sont plus la variable de référence et la rétroaction devient un outil.
Ce qui importe, c’est que l’élève fasse quelque chose du retour d’information — qu’il agisse à la fois mentalement et pratiquement. Nous voulons qu’il puisse en tirer des enseignements à court, moyen ou long terme en matière de stratégies et d’apprentissage et de cibles pour ses efforts.
Dès lors, la question n’est pas simplement de savoir à quoi ressemble un bon retour d’information. L’enjeu est double :
Comment concevoir les processus éducatifs de manière à utiliser la rétroaction de façon optimale ?
Comment soutenir les élèves dans le développement d’une attitude proactive requise vis-à-vis du retour d’information ?
Le retour d’information devient ainsi une question de conception qui relève d’un processus imbriqué dans le lien entre enseignement et apprentissage.
Nous passons d’une posture de transmission de la rétroaction de l’enseignant à l’élève, vers cette transformation.
La rétroaction de transmission fonctionne lorsque les élèves sont consciencieux et motivés :
L’élève soumet une production et l’enseignant l’analyse et rédige en retour une rétroaction.
Plus la production est complexe et plus elle contient d’erreurs, plus l’enseignant y consacre du temps.
L’élève peu consciencieux ne tiendra que peu compte de la rétroaction de l’enseignant peut-être parce qu’il se sent dépassé.
L’élève consciencieux prend en compte à la lettre la rétroaction de l’enseignant et s’investit en profondeur. Il en est demandeur, car il en perçoit les bénéfices qu’il en retire.
L’élève consciencieux améliore sa production, mais dans quelle mesure a-t-il réellement développé son autonomie ?
Le retour d’information sur la transmission est très apprécié des élèves, car il est prêt à l’emploi : leur production est corrigée et les améliorations sont ciblées. Par conséquent, il n’est pas réellement une difficulté désirable qui leur permet de progresser en tant qu’apprenants. Généralement, sa prise en compte dépend de leur non-vouloir.
Le retour d’information transformatif vise à entraîner réellement un changement (à long terme) chez l’élève :
Si nous voulons que l’élève se développe, la rétroaction sera moins spécifique par rapport à la production d’origine, plus générale et orientée vers le futur. Elle devient susceptible d’encourager la réflexion et l’autonomie vers la maitrise des objectifs d’apprentissage.
La rétroaction est pensée comme une difficulté désirable. Elle demande à l’élève qu’il s’investisse et se confronte à des défis plutôt que de lui offrir une correction complète de ses productions avec des conseils ciblées pour l’améliorer.
Le retour d’information qui permet à l’élève de s’améliorer en tant qu’apprenant lui demande de relever des défis.
Les difficultés désirables sont des interventions qui rendent le processus d’apprentissage plus difficile à court terme, mais qui permettent aux élèves de mieux mémoriser la matière à long terme. C’est ce que nous voulons pour la rétroaction.