Amplification du comportement antisocial en comportement violent sous l’influence de réseaux de pairs
Selon le modèle de coercition (Patterson et coll., 1992), un renforcement négatif de comportements problématiques relativement mineurs et occasionnels pendant l’enfance peut conduire à leur apprentissage et à l’augmentation de leur fréquence. Parallèlement, ceux-ci deviennent de plus en plus graves et sérieux. Cela peut mener à des comportements d’agression, de mensonge ou de vol.
La manifestation de tendances antisociales au milieu de l’enfance est souvent associée à une mauvaise adaptation d’élèves à l’école. Cela se traduit par exemple, en un rejet de l’élève concerné par ses pairs conventionnels ou une situation d’échec scolaire. Cela peut mener ces élèves au désengagement face aux formes conventionnelles d’activités sociales saines et équilibrées. Parallèlement, cela favorise le rapprochement et l’auto-organisation des groupes de pairs qui manifestent des comportements antisociaux similaires. De tels groupes de pairs antisociaux favorisent souvent l’expression de ces comportements problématiques et leur escalade vers la violence (Dishion, Ha, & Véronneau, 2012 ; Van Ryzin & Dishion, 2013).
Plus particulièrement, Dijkstra et ses collaborateurs (2010) ont conceptualisé l’influence des pairs sur le port d’armes comme un exemple spécifique d’amplification du comportement agressif :
Dans un échantillon de lycéens américains, ces auteurs ont constaté que les jeunes qui déclaraient porter des armes devenaient plus populaires parmi leurs amis.
Conformément à l’hypothèse de confluence, ils ont constaté que les amis s’influençaient mutuellement pour adopter plus largement un comportement de port d’arme.
Les niveaux d’agression déclarés par les pairs permettent de prédire l’augmentation du port d’armes au fil du temps.
Ce résultat lié au port d’arme et aux comportements d’agression confirme l’hypothèse de l’amplification du comportement antisocial en comportement violent dérivée du modèle de coercition.
Kornienko et ses collègues (2017) ont examiné l’hypothèse de confluence (Dishion et coll., 1994) du développement du comportement antisocial en comportement violent au début de l’adolescence. Ils ont également testé l’hypothèse de l’amplification du comportement antisocial en comportement violent (Capaldi & Patterson, 1996) dans le contexte dynamique des réseaux de pairs à l’adolescence. Ils ont cherché à savoir si les jeunes (12 à 14 ans) choisissaient leurs amis en fonction de leur comportement antisocial et si cette dynamique des pairs au début de l’adolescence amplifiait la violence.
Conformément au modèle de confluence, la cohorte la plus jeune a choisi des pairs qui avaient des niveaux similaires de comportement antisocial. Le comportement antisocial était associé à des augmentations des niveaux de comportement violent au niveau de l’individu.
Les adolescents plus âgés, en revanche, ne choisissaient pas leurs amis en fonction de leur comportement antisocial, mais adoptaient les niveaux de comportement violent de leurs amis, ce qui corrobore en partie le modèle de confluence. Enfin, pour les jeunes de la cohorte, le comportement violent n’était pas prédictif du choix des amis et il n’y avait pas d’influence des pairs sur le comportement violent.
Dans l’ensemble, ces résultats suggèrent que les réseaux de pairs interagissent avec un ensemble complexe d’influences. Ces influences changent d’une année à l’autre, avec un potentiel d’amplification du comportement antisocial vers des formes plus graves de violence (par exemple, le port d’armes). Ce processus se produit par le biais de la sélection et de l’influence des pairs.