Atteindre un taux de réussite de 80% au terme de la pratique guidée en enseignement explicite
Barak Rosenshine l’explique dans ses « Principles of Instruction » (2012). Des observations en classe ont permis d’établir que les élèves des classes où les enseignants sont plus efficaces ont un meilleur apprentissage. Ils rencontrent également un taux de réussite plus élevé que ceux des classes où les enseignants sont moins efficaces dans leurs activités en classe. Une preuve de ce phénomène est que leurs élèves démontrent une meilleure qualité de leurs réponses orales.
Barak Rosenshine ajoute que les recherches indiquent que le taux de réussite optimal en classe pour favoriser la réussite des élèves semble être d’environ 80 % durant la pratique guidée. Les enseignants les moins performants ont en général un taux de réussite inférieur.
Un taux de réussite de 80 % semble permettre d’atteindre deux enjeux majeurs :
Les élèves sont mis au défi et engagés
L’apprentissage des élèves est optimisé à l’échelle de la classe
En effet, c’est lorsque les élèves sont à la fois engagés et performants qu’ils apprennent le plus.
Il semble donc s’agir d’une question d’engagement et de performance.
Une analogie entre le taux de 80 % de réussite en pratique guidée et le taux de renforcement positif
Une façon de comprendre comment nous soutenons l’engagement des élèves face à un taux de 80 % est de faire l’analogie avec la règle des 5 pour 1. C’est-à-dire qu’un élève devrait obtenir cinq occasions de renforcement positif pour une remarque négative.
Ainsi pour être encouragé à s’engager, un élève doit être capable de répondre correctement et de comprendre quatre fois sur cinq. Présenté autrement, le fait de rencontrer une difficulté pour cinq exercices résolus semble favoriser le maintien d’un engagement afin de fournir les efforts demandés qui génèrent peu à peu l’apprentissage escompté.
Une analogie entre le taux de 80 % de réussite en pratique guidée et la loi de la tolérance de Shelford
La loi de tolérance de Shelford est un principe important dans le domaine de l’écologie. Il a été développé par le zoologiste américain Victor Ernest Shelford en 1931. Cette analogie permet de mieux comprendre l’importance de la performance.
La loi de la tolérance stipule que le succès d’un organisme dans un écosystème donné est basé sur un ensemble complexe de conditions. Chaque organisme connait un développement en fonction de l’un ou l’autre facteur environnemental ou d’une combinaison de ces facteurs. Selon la valeur prise par un tel facteur, son développement peut être minimum, maximum ou moyen.
Si nous isolons un facteur comme la température du milieu, un organisme va se développer de manière optimale dans une certaine fourchette de températures. En deçà et au-delà, son taux de développement chute. Par exemple, la truite fario (Salmo trutta) présente une zone de préférence thermique qui s’étend d’environ 4 à 19 °C. Évoluant dans cet intervalle, elle connait un développement optimal. Si la température dépasse ces valeurs, au-delà de 19 °C, son développement sera de plus en plus ralenti, car elle se trouve en situation de stress physiologique. À partir de 25 °C, sa survie est menacée à court terme. Une distribution similaire peut se manifester avec des températures trop basses.
Un facteur écologique joue le rôle de facteur limitant lorsqu’il conditionne les possibilités de succès d’un organisme dans ses tentatives de colonisation d’un milieu. Ce facteur peut être limitant par son absence ou par son excès.
Nous illustrons généralement la loi de la tolérance sous la forme d’une courbe en forme de cloche. Elle représente de manière simplifiée les besoins et les limites écologiques d’une espèce.
L’analogie possible avec le taux de réussite élevé de Barak Rosenshine revient à considérer :
Sur l’axe vertical le taux d’apprentissage des élèves, qui représente ce que les élèves sont occupés à apprendre. Au plus il est élevé, au plus il est avantageux.
Sur l’axe horizontal, nous considérons le taux de performance en classe. C’est le pourcentage de bonnes réponses données par les élèves lors d’une vérification orale par l’enseignant ou lors de la réalisation de tâches ou d’exercices, lors de la pratique guidée.
Selon les observation de Bark Rosenshine l’optimum du taux de performance correspondrait à 80 % de bonnes réponses :
Lorsque les élèves ont une faible performance, ils commettent de nombreuses erreurs, ce qui amoindrit leur taux d’apprentissage.
Lorsque les élèves manifestent une performance très élevés, ils atteignent leur surapprentissage et développent des automatismes, ce qui fait qu’il ne leur reste plus grand-chose à apprendre.
L’intérêt de ce principe pour l’enseignant, c’est qu’il peut avoir accès au taux de performance, mais pas au taux d’apprentissage de ses élèves. Le premier est mesurable en classe, le second n’est approchable par évaluation qu’à moyen et long terme.
Ce que propose Barak Rosenshine c’est une prise en compte d’un optimum de performance (80 %), sur lequel nous avons une marge d’action. Celui-ci favorise le développement d’un apprentissage dont la mesure directe échappe en partie à la maîtrise de l’enseignant.