Biais cognitifs du nouvel enseignant face à la gestion de classe
Une difficulté des enseignants débutants est qu’ils sont avant tout d’anciens élèves également. En tant qu’élèves, les enseignants débutants ont passé un nombre considérable d’heures dans des classes à observer les agissements de dizaines d’enseignants plus ou moins efficaces.
Probablement que leur envie de devenir enseignant est liée à certains enseignants qui les ont marqués durant leur parcours, qui leur ont donné envie d’approfondir une matière ou de passer la rampe. En se projetant enseignant, ils ont imaginé le prof idéal qu’ils aimeraient être pour leurs élèves et qu’ils auraient apprécié avoir eux-mêmes.
L’environnement d’une classe peut leur sembler extrêmement familier, au point qu’ils pourront penser que la transition du statut d’observateur expérimenté vers celui acteur assermenté peut être naturelle et harmonieuse. Cependant, prendre la responsabilité d’enseigner à un groupe de vingt ou trente adolescents ou enfants réunis est une tâche fondamentalement différente de celle d’être un élève au milieu d’autres, dans une classe.
De nombreuses dimensions sont implicites et cachées. En tant qu’élèves, nous avons observé des enseignants sans être conscients des décisions prises constamment et de toute la planification préalable aux activités orchestrées :
Nous prenons part à un environnement qui a été préparé, nous ne voyons que le sommet de l’iceberg.
Nous nous engageons dans des activités qui ont été élaborées pour nous et dans des interactions codifiées avec l’enseignant et nos pairs.
Nous n’avons pas conscience de toute la part invisible, des garde-fous et de la structuration qui permet un enseignement et un apprentissage fluide et harmonieux d’avoir lieu.
Par exemple, tandis que nous étions élèves, lorsque nous avons observé un enseignant réagir face au comportement inapproprié d’un condisciple :
Nous n’avons pas pris conscience des stratégies discrètes préalables, au niveau de la prévention et de l’intervention, mises en place par celui-ci, ni des modèles de gestion du comportement qu’il mobilisait.
Nous ne saisissions pas non plus les différents paramètres face auxquels l’enseignant était vigilant et qui allaient déterminer son intervention tout en minimisant l’impact sur la classe.
Aussi longtemps qu’un nouvel enseignant ne s’est pas retrouvé suffisamment longtemps devant une classe, il sera victime de ses biais cognitifs. Observer un enseignant expérimenté peut aider, mais pour mesurer l’écart avec ses propres premiers pas dans l’exercice de l’enseignant. Rapidement, la prise de conscience du besoin de développer de bonnes compétences concrètes en gestion de classe s’imposera a lui.