Comprendre la notion d’interférence catastrophique en lien avec l’entremêlement
L’intérêt de l’entremêlement peut se comprendre à travers le phénomène d’interférence catastrophique, un phénomène observé lors de la formation des réseaux neuronaux (McCloskey & Cohen, 1989).
La notion d’interférence catastrophique peut se comprendre de la manière suivante :
Considérons qu’un réseau se soit formé pour apporter une réponse en fonction d’un ensemble de critères.
Imaginons qu’il est ensuite soumis à un nouvel ensemble de critères différents répondant à un fonctionnement différent.
Le réseau va perdre l’accès à ce qu’il avait formé pour le premier ensemble de critères, car les réponses apportées ne sont plus fonctionnelles.
Le réseau va maintenant optimiser complètement sa performance en fonction de la nouvelle tâche.
En un sens, le nouveau réseau remplace l’ancien réseau, ce qui se révèle problématique s’il est de nouveau confronté au premier ensemble de critères.
La solution à ce problème consiste simplement à entremêler les deux ensembles de critères. De cette manière, le réseau est forcé d’optimiser son comportement aux deux tâches. Le réseau apprend à s’adapter et n’en oublie pas le fonctionnement d’une tâche au profit de l’autre par ce biais. Il devient capable de réaliser les deux types de tâches en fonction de l’ensemble de critères entrants.
Dans cette perspective, les deux types de problèmes cessent de constituer deux entités séparées, mais forment une seule entité regroupant deux types distinguables. Un processus de discrimination est mis en place afin de déterminer chaque fois le traitement approprié.
D’autres recherches semblent montrer que l’apprentissage humain présente également ce comportement d’interférence catastrophique (Mirman & Spivey, 2001). L’apprentissage séquentiel aurait tendance à former des ensembles de connaissances déconnectés les uns des autres tandis que l’apprentissage entremêlé aiderait à former un ensemble cohérent de connaissances. L’entremêlement permettrait d’éviter les interférences catastrophiques.
Par exemple, durant plusieurs semaines, un enseignant en mathématiques étudie avec ses élèves les équations du premier degré. Ensuite durant plusieurs semaines également, il étudie avec ses élèves les équations du second degré sans revenir sur le premier degré. Il est probable que si, à ce moment-là, il soumet à ses élèves un exercice portant sur une équation du premier degré, un certain nombre de ses élèves vont se tromper. Ils vont mobiliser de manière erronée une procédure propre au second degré. S’il avait pratique l’entremêlement, ce phénomène ne se serait pas déroulé.
Des recherches en neurosciences (Kantak et coll., 2010) laissent supposer que la pratique entremêlée et la pratique séquentielle, en tout cas pour les tâches motrices, stimulent préférentiellement des zones différentes du cerveau. L’entremêlement implique le cortex préfrontal. La pratique séquentielle implique le cortex moteur primaire.
Nous savons que le cortex préfrontal est le siège de différentes fonctions cognitives dites supérieures, comme le langage, la mémoire de travail, le raisonnement, et plus généralement les fonctions exécutives. Il est significatif pour la profondeur de traitement que la pratique liée à l’entremêlement mobilise sélectivement cette zone du cerveau.