Croissance conceptuelle et concurrence conceptuelle
Le développement de nos connaissances dans un domaine peut être vu comme un processus qui associe croissance conceptuelle et concurrence conceptuelle. Nous passons de certains modèles et de l’usage de certaines stratégies à d’autres, plus complexes et plus adaptés aux nouvelles situations auxquelles nous faisons face. Cela peut se faire de manière fluide et parfois également en déconstruisant certaines conceptions.
La notion de croissance conceptuelle
Le psychologue Robert Siegler (Emerging Minds, 1996) est à l’origine de la théorie des vagues qui se chevauchent (overlapping waves theory). La façon dont nous apprenons est comparable au sac et au ressac des vagues qui se chevauchent à la marée montante. Le mouvement vers le développement est inexorable, mais il est fait d’avancées et de reculs qui se croisent.
Tandis que nous développons notre maitrise, nous utilisons différentes stratégies et différents modes de compréhension ou de modèles en fonction du temps.
La théorie des « vagues qui se chevauchent » peut par exemple s’appliquer à l’apprentissage de l’orthographe présente l’idée. Lorsqu’un élève est engagé dans une tâche, il pense souvent de différentes manières et n’utilise pas une seule stratégie. L’usage de telle ou telle stratégie est fonction du développement de sa maitrise et de ses connaissances.
À tout moment, dans une classe, les élèves réfléchissent de différentes manières et leur compréhension fluctue au fur et à mesure que de nouvelles compréhensions se superposent à leurs compréhensions préexistantes et se concurrencent entre elles tout en évoluant. La fréquence de ces modes de pensée change progressivement et des modes de pensée plus avancés sont constamment introduits. Dans ce cadre, le rôle de l’enseignant est d’orchestrer et de guider ce mouvement de croissance conceptuelle.
La notion de concurrence conceptuelle
Les conceptions erronées sont largement répandues, prévisibles et sont facilement anticipées par un enseignant possédant une large expertise de sa matière, de son enseignement et des difficultés propres à son apprentissage.
Il y a un consensus de la recherche sur le fait que les conceptions erronées sont probablement impossibles à déloger complètement :
Nous ne sommes généralement pas entièrement conscients que certaines connaissances que nous possédons sont erronées. Même si nous le savons, nous pouvons oublier qu’elles le sont, mais sans les oublier elles-mêmes.
Si nous possédons ces connaissances erronées dans notre mémoire à long terme, c’est qu’elles ont été apprises et renforcées à un moment donné. Elles ont dû avoir une certaine utilité pour nous à un certain moment et dans un contexte donné.
Certaines conceptions erronées peuvent être profondément ancrées dans notre mémoire à long terme. Au fur et à mesure que de nouvelles informations sont intégrées dans leurs schémas erronés, leur disponibilité est conservée. Malgré le fait d’avoir appris de nouvelles connaissances dans un contexte donné, l’élève est susceptible de continuer à répondre dans certaines conditions en fonction de conceptions erronées, même si parallèlement il a également appris le bon raisonnement.