Éviter la non-vigilance et adopter une vigilance détendue
Lorsque, enseignants, nous nous déplaçons dans les couloirs, à l’extérieur d’un bâtiment ou dans le cours de récréation, nous nous dirigeons souvent rapidement d’un lieu à l’autre, pressés par le temps.
Nous pouvons croiser des élèves qui ne sont pas là où ils devraient être ou qui sont en infraction mineure face aux attentes comportementales. Nous pouvons avoir différentes préoccupations en tête. Elles sont des bonnes excuses qui font qu’il est facile de ne pas voir ce qui se passe et négliger d’intervenir. Nous nous rassurons en nous disant que nous n’avons pas le temps. Nous faisons preuve à ce moment-là de non-vigilance.
C’est une erreur. Il faut au contraire faire preuve de vigilance, mais dans le sens d’une vigilance détendue.
Nous devons nous arrêter et prendre le temps de gérer, de régler la situation dans une démarche de fermeté et d’apaisement, et le faire bien.
S’il y a d’autres élèves à proximité qui font office de public, il ne faut pas traiter la situation directement. Nous demandons alors aux élèves concernés de nous suivre vers un lieu scolaire où nous pourrons discuter brièvement avec eux, loin de cette audience immédiate.
Cette approche est souvent préférable dans les cours de récréation, dans les couloirs fréquentés, comme elle l’est en classe. Elle protège les élèves concernés et évite tout débordement potentiel lié au fait qu’ils peuvent vouloir se sauver la face vis-à-vis des autres élèves.
Un autre avantage c’est que cela crée un cadre qui favorise la discussion, souligne l’importance que nous accordons à cette infraction. De plus, cela laisse quelque peu le temps de réfléchir et apporter un élément de formalisme scolaire. L’enseignant ne devra plus introduire ce dernier sur le champ dans son discours exprimé en un lieu public.
Les élèves peuvent se demander ce qui leur arrive. Cela permet de leur dire qu’ils n’auront pas d’ennuis. Cette brève conversation a pour enjeu de discuter de leur comportement face aux attentes et aux règles en vigueur.
Rien que le fait de prendre le temps d’agir, d’accompagner les élèves respectueusement et de faire passer un message clair, mais ferme, non assorti de sanctions, a un effet certain. Il sera temps d’escalader, plus tard, en cas de récidive avérée.
Le temps investi est réduit, mais il est utilisé à bon escient. Il a toutes les chances d’avoir un impact sur le comportement futur. Passer à côté des élèves et ignorer le comportement problématique au contraire le valide et appelle à sa répétition. Il risque alors de devenir une habitude pour ces élèves qui sera d’autant plus compliquée à changer.
L’enjeu dans toute la démarche est d’éviter toute confrontation visuelle, verbale ou publique. Il ne faut jamais se donner en spectacle ou donner l’impression d’une épreuve de force.
Dans ce type d’échanges avec les élèves, il faut éviter toutes les amorces comportementales qu’ils peuvent lancer. Ils peuvent froncer les sourcils, détourner les yeux, voire ricaner ou demander pourquoi. Tactiquement, il faut ignorer ces manœuvres périphériques et une fois qu’il est ainsi isolé, garder toute l’attention sur le problème principal qui a justifié l’intervention.
Si nous ne connaissons pas les élèves, nous nous présentons et nous leur demandons leurs noms et leur classe.
Nous leur demandons de nous rappeler quel est le comportement attendu dans le lieu concerné. Nous ne leur demandons à aucun moment pourquoi ils n’ont pas respecté la règle.
Il s’agit également d’éviter les esquives. Par exemple, les élèves pourraient dire que d’autres enseignants tolèrent ce genre de comportement et les ignorent. Dans ce cas, il suffit de dire que peut-être qu’ils le font, en souriant, mais que vous respectez le règlement. Ce qui permet de marquer un accord partiel sur la nature du comportement.
Les élèves retiennent rapidement quels enseignants sont vigilants et lesquels sont non vigilants. Ils savent avec quels enseignants ils doivent se tenir à carreau et auprès desquels ils peuvent prendre des libertés avec le cadre.
Si un élève n’est pas capable de rappeler le comportement attendu dans le lieu où il a été pris en infraction, nous allons y répondre pour eux. Nous expliquons clairement (et équitablement) ce qui est attendu en fonction des valeurs et de la culture de l’école.
Ce processus est un moyen de sensibiliser les élèves au comportement qui est bien plus efficace que de passer par la sanction tant qu’il ne s’agit pas de récidives.