La stratégie de l’interrogation élaborée
Les humains sont des créatures curieuses par nature, à l’écoute et à la recherche d’explications sur les phénomènes dont ils sont témoins, sur les observations qu’ils font du monde qui les entoure. Cette tendance gagne à être mise à profit pour promouvoir l’apprentissage.
L’interrogation élaborée est une stratégie cognitive d’apprentissage. Un élève qui a déjà acquis certaines nouvelles connaissances dans un nouveau domaine s’emploie à les structurer en créant des liens entre ces connaissances et avec des connaissances préalables. Pour le réaliser, il répond à des questions sur le comment et le pourquoi, et fait des analogies ou des comparaisons.
La clé de l’interrogation élaborée est d’inciter les élèves à produire une explication pour un élément de connaissance explicitement énoncé. Par conséquent, elle intervient essentiellement à la suite d’un modelage et dans toutes les phases ultérieures d’un enseignement explicite. Stratégiquement, elle prend de plus en plus d’importance dans le cadre de la vérification de la compréhension et de l’évaluation formative. Elle gagne à être de plus en plus utilisée au fur et à mesure que l’on progresse dans l’enseignement et l’apprentissage d’un ensemble de nouveaux contenus.
L’interrogation élaborée consiste à (se) poser des questions et essayer d’y répondre dans le cadre d’une matière enseignée. Les démarches se font au niveau de l’acte de :
La récupération de connaissances précédemment apprises
La compréhension qui permet d’établir de nouveaux liens.
L’enjeu est de mieux comprendre pourquoi et quand ça fonctionne, comment les différents concepts, procédures et règles sont articulés entre eux et avec les connaissances préalables. L’interrogation élaborée est une stratégie d’apprentissage génératif dans le sens où elle permet la construction de nouvelles connaissances sous forme de liens.
Les effets de l’interrogation élaborée sont souvent plus importants lorsque :
Les explications générées sont précises plutôt qu’imprécises, plus exactes qu’inexactes.
Lorsque les connaissances antérieures sont assimilées en profondeur plutôt que de manière superficielle et incomplète, ce qui permet de faciliter la création de liens significatifs.
Lorsque les élaborations sont autogénérées par l’élève plutôt que fournies par l’enseignant ou par un support de cours. C’est-à-dire que l’élève construit ses propres réponses plutôt qu’il les retrouve dans ses notes ou dans les interventions d’autres élèves ou de l’enseignant.
Une étude remarquable sur les avantages de l’interrogation élaborée
Wood, Pressley et Winne (1990) ont réalisé une étude auprès d’élèves (âgés de 8 à 14 ans).
Ils leur ont lu neuf histoires décrivant chacune la vie et les habitudes d’un animal, par exemple, la mouffette tachetée de l’Ouest, la baleine bleue, le manchot empereur, etc. :
Dans une condition de contrôle, les élèves ont simplement lu chaque histoire, qui exposait six informations sur l’animal.
Dans une condition d’interrogation élaborée, les élèves devaient fournir une explication pour chacune des six informations contenues dans l’histoire. Par exemple, l’une des informations était que la mouffette tachetée de l’Ouest élit domicile dans un terrier creusé dans le sol. Les élèves soumis à la condition d’interrogation élaborée devaient expliquer pourquoi cet animal vivait dans un terrier (par exemple, il le fait pour se protéger et protéger sa famille).
Lors d’un test final, les élèves ont été évalués par rapport aux connaissances relatives aux animaux qu’ils avaient découverts par la lecture. Ils ont été invités à se rappeler le nom des animaux auxquels chaque élément de connaissance correspondait.
Les élèves qui s’étaient livrés à une interrogation élaborée tout en étudiant ont pu relier davantage de connaissances aux animaux concernés que les élèves qui n’avaient fait que lire les documents.