L’évaluation comme indicateur de la progression face à des critères de réussite
Un changement de paradigme
Si nous sommes devenus enseignants, c’est très certainement parce que nous nous soucions du développement intellectuel de nos élèves ou parce que nous voulons leur transmettre une passion pour nos matières.
L’enjeu est d’y parvenir le mieux possible, dans les limites de nos ressources, ce qui implique d’adhérer à un modèle de l’évaluation dans ses différentes fonctions.
L’enjeu de l’évaluation sommative ou certificative est de juger des progrès des élèves en fonction de la part du programme scolaire qu’ils ont appris. Naturellement, le processus d’apprentissage des contenus visés va jouer un rôle important. Dans ce processus, l’évaluation vient tomber à un moment donné tel un couperet.
Progressivement, l’évaluation s’est progressivement éloignée de cette vision d’une fonction purement sommative à tendance normative. Celle-ci était centrée sur la certification et le classement des élèves. Elle a évolué vers un modèle de l’évaluation, plus formative et constructive.
C’est le passage du paradigme de l’évaluation normative vers une évaluation au service des apprentissages. Celle-ci vient au terme d’une progression, valider l’acquisition des connaissances et des compétences visées.
La perspective de l’alignement curriculaire
Une évaluation comme indicateur de la progression se veut en phase avec les apports de la science de l’apprentissage. Ceux-ci concernent l’importance de l’engagement cognitif et l’établissement d’apprentissages durables.
Pour y arriver, il est nécessaire de s’inscrire dans la logique de l’alignement curriculaire. Celui-ci demande une correspondance claire entre les intentions pédagogiques (objectifs d’apprentissage), les activités d’apprentissage et les situations d’évaluation. Les critères de réussite vont devenir le lien explicite entre ces trois composantes (Biggs & Tang, 2011).
Les critères de réussite
Les critères de réussite sont déclinés à partir des objectifs d’apprentissage dont ils viennent expliciter ce qui est attendu concrètement en matière de maîtrise. Ils servent de repères clairs pour les élèves et les enseignants.
Nous spécifions par-là soigneusement ce que nous avons l’intention d’enseigner. De cette manière, nous pourrons facilement évaluer si nos élèves l’ont appris.
Si quelques élèves ne répondent pas à certaines de nos attentes, nous pouvons, sur base de ces critères de réussite, déterminer les connaissances qui leur manquent. Nous pouvons également supposer qu’ils pourraient avoir besoin d’un soutien supplémentaire.
Le processus d’évaluation formative
La concrétisation de ces démarches se manifeste dans les processus d’évaluation formative. L’évaluation formative est considérée comme un processus continu, intégré à l’enseignement et à l’apprentissage. Son objectif est d’identifier, en temps réel, les acquis et les lacunes des élèves par rapport aux critères établis, permettant ainsi des ajustements opportuns des stratégies d’enseignement et des supports d’apprentissage (Wiliam, 2011).
Lorsqu’elle est régulière et intégrée, l’évaluation formative permet aux enseignants de savoir où en sont les élèves, ce qu’ils doivent atteindre, et comment y parvenir. C’est ce que Wiliam (2011) appelle les trois questions clés de l’évaluation formative.
Les écarts entre la performance observée et les critères de réussite deviennent des points de départ pour un enseignement adaptatif. Ils aident à répondre à la question cruciale : « Que doit-il se passer ensuite pour que l’élève progresse (Wiliam, 2011) ? »
Le transfert de responsabilité des apprentissages
Les critères de réussite sont indispensables pour générer une rétroaction constructive et formative vers l’élève. Plutôt que simplement indiquer une erreur, les enseignants peuvent se référer directement aux critères pour expliquer ce qu’un élève a réussi et où des améliorations sont nécessaires (Hattie & Timperley, 2007). Une rétroaction efficace est orientée vers la tâche, le processus et l’autorégulation, guidant les élèves vers la progression.
Les démarches de transfert de responsabilité des apprentissages sont également importantes. Elles sont soutenues par la promotion d’outils d’auto-évaluation et d’évaluation par les pairs. La compréhension des critères de réussite permet aux élèves de s’évaluer et d’évaluer efficacement leurs pairs. Ce processus cultive également des compétences métacognitives essentielles à l’autorégulation de l’apprentissage (Earl & Katz, 2006 ; Black & Wiliam, 1998).