Proximité, rigueur et sévérité dans l’authenticité de l’enseignant
Dans le cadre de sa thèse de doctorat, Pedro De Bruyckere (2017) s’est intéressé à ce qui rendait un enseignant authentique auprès de ses élèves. Ses conclusions ont été publiées dans le cadre d’un article de recherche cosigné avec Paul A. Kirschner. Voici deux éléments de synthèse :
La proximité
Les élèves apprécient certaines formes de proximité témoignées par leur enseignant.
Le critère de qualité de la proximité implique l’élément d’équité, tout en suggérant le maintien d’une distance entre l’enseignant et l’élève :
Les élèves jugent important que leur enseignant s’intéresse à eux, à leurs difficultés scolaires et à qu’ils sont. Cela peut se dérouler à l’intérieur ou à l’extérieur du cadre de la classe, et pendant des moments plus informels.
Les élèves s’intéressent moins à la vie personnelle de leurs enseignants. Les élèves veulent conserver une distance. Si cette distance est comblée, cela pourrait se produire ponctuellement dans des moments informels en dehors des temps de cours ou lors d’activités parascolaires.
L’enseignant capable d’établir le degré de proximité adéquat avec ses élèves stimule par là également l’établissement d’une atmosphère positive en classe. Dans ce cadre coopératif en classe, les élèves évoluent entre eux et avec l’enseignant dans une relation de travail respectueuse.
Le critère de proximité correspond à l’idée que l’enseignant témoigne du respect pour ses élèves. L’enseignant est compétent :
L’enseignant sait comment jouer son rôle pleinement et gérer une classe.
L’enseignant est juste et bienveillant.
L’enseignant sait prendre le temps pour discuter avec ses élèves de leurs difficultés et pour leur donner une rétroaction qui les guide efficacement.
La question de la rigueur et de la sévérité
D’une manière paradoxale, le critère de rigueur et de sévérité dont témoigne un enseignant se révèle moins fiable statistiquement pour les élèves dans sa contribution à la construction du sentiment d’authenticité de l’enseignant.
Être perçu comme rigoureux en tant qu’enseignant, est vu par les élèves comme le fait de vouloir commencer tout de suite à travailler. C’est faire preuve de rigidité, c’est être moins focalisé sur l’élève et plus sur l’enseignement. L’enseignant paraitrait avant tout fier d’être enseignant, fier de lui-même. Il enverrait le message que ce qu’il fait est par défaut important pour l’élève.
Si le critère de rigueur et de sévérité est moins signifiant pour l’élève, il n’en reste pas moins que ces aspects constituent un prérequis sous-jacent qui permet aux trois autres critères d’exister.
Si le critère de rigueur et de sévérité ne contribue pas directement comme une entité propre c’est qu’il a vocation à être transparent. En effet, tout temps consacré à la résolution de conflits en classe ou de perturbations du cours est une perte nette de temps scolaire pour l’apprentissage.
Ces constatations sur l’absence d’importance ou la transparence de cette dimension pour forger l’authenticité de l’enseignement sont néanmoins signifiantes et intéressantes.
Elles renforcent l’idée de privilégier une approche explicite et positive de la gestion des comportements. Celle-ci se fonde sur la définition d’un cadre précis, sur l’établissement de routines, d’un renforcement positif ou d’une rétroaction spécifique avec l’expression concrète d’une vigilance apaisée.
Le comportement attendu passant par le biais d’un enseignement explicite, il gagne ainsi naturellement en authenticité pour l’élève. L’enseignant s’appuie sur des facteurs qui pour lui sont signifiants, il construit le cadre et les prérequis, nécessaires à l’établissement d’une atmosphère de travail propice. Avec un enseignant authentique, cette dimension se fond dans le décor. Le cadre essentiellement préventif de la gestion de classe qu’il installe le dispense de devoir manifester trop de rigueur et de sévérité. Il développe de bonnes habitudes chez ses élèves.