Utiliser la taxonomie de Bloom pour concevoir un enseignement explicite
La taxonomie de Bloom, dans sa version actuelle ou révisée peut être utile pour mener une réflexion sur les objectifs d’apprentissage, en lien avec les contenus enseignés. Avant de pouvoir s’élever dans ses étages, il est nécessaire de s’assurer de la maitrise et de la consolidation de ses fondements.
Les apports de la science de l’apprentissage nous aident à interpréter la pyramide de Bloom d’une manière réellement utile. Les caractéristiques établies de notre mémoire à long terme et de notre mémoire de travail impliquent certains modes de fonctionnement pour assurer un apprentissage durable et profond. L’enseignement explicite s’inscrit dans cette logique.
L’acquisition et l’intégration de connaissances dans des schémas riches et interconnectés sont fondamentales pour l’apprentissage et l’exercice des compétences d’ordre supérieur. Nous n’aurons pas les structures en place pour mener une réflexion approfondie si nous n’avons pas passé du temps à maitriser un ensemble de connaissances préalables à cette réflexion.
Nous ne pouvons pas non plus être créatifs dans un domaine si nous ne possédons pas, en mémoire, un ensemble intégré de savoirs et savoir-faire dans celui-ci. De même, la capacité d’analyser et de faire preuve d’esprit critique nécessite une connaissance factuelle approfondie.
Les processus de pensée critiques tels que le raisonnement et la résolution de problèmes sont intimement liés aux connaissances factuelles et spécifiques à un domaine qui sont stockées dans la mémoire à long terme. Leur disponibilité dans l’environnement grâce à des livres ou à des ressources numériques ne peut suffire.
La représentation de la taxonomie de Bloom sous la forme d’une pyramide reconnaît de fait ce principe important. Nous ne pouvons pas atteindre les niveaux supérieurs de la pensée créative et critique, sans une large et solide base de connaissances en dessous. La pyramide s’écroulerait sans elles.
Dès lors, pour les enseignants, la priorité doit être d’aider les élèves à développer un riche ensemble de connaissances dans leur domaine de matière afin d’être productifs ensuite dans des tâches plus exigeantes.
Sans favoriser l’acquisition durable en mémoire à long terme de riches connaissances organisées, nous handicapons considérablement la capacité de nos élèves à s’engager dans des activités cognitives comme la réflexion, l’évaluation et la création.
L’absence d’informations facilement accessibles dans notre mémoire à long terme, même contrebalancée par leur découverte sur un moteur de recherche, limite fortement notre réflexion. Celle-ci sera réduite par la taille limitée de notre mémoire de travail.
Dès lors, nous allons avoir tendance à voir les nouvelles connaissances découvertes de manière isolée et non contextuelle, ce qui conduit à une réflexion superficielle. À l’opposé, notre mémoire à long terme est sans limites connues.
Nos connaissances en mémoire à long terme ne sont pas une accumulation des éléments statiques et déconnectés, mais seront d’autant plus richement interconnectées que nous les mobiliserons fréquemment.
Lorsque nous apprenons de nouvelles connaissances, nous construisons et empruntons et réorganisons des structures mentales appelées schémas qui nous permettent de traiter et d’accéder plus efficacement des situations inédites.
La maitrise d’un ensemble de connaissances est un prérequis à une réflexion approfondie. La taxonomie de Bloom doit être utilisée comme outil d’enseignement pour équilibrer la nature des tâches d’apprentissage offertes aux élèves plutôt que pour privilégier une dimension à d’autres.