Mesurer l'apprentissage et non seulement la performance
Nous devons être bien conscients des limites d’une évaluation formative qui mène à une rétroaction ou d’une évaluation sommative qui aboutit à une note constructive. Lorsqu’elles sont prises isolément, elles sont avant tout des mesures d’une performance capturée à un moment donné.
Le risque est qu’il n’existe pas d’autres évaluations avant ou après abordant avec un certain délai la mesure de la maîtrise des mêmes objectifs d’apprentissage. Dès lors, rien ne nous permet de dire s’il s’agit réellement d’un apprentissage.
Peut-être que l’élève qui réussit a tout étudié en une seule session continue, dans la dernière ligne droite. On parle alors de bachotage. Rien ne nous permet d’être certains que tout ne sera pas oublié en grande partie dans un délai de deux à trois semaines.
Après avoir passé une évaluation ponctuelle à un moment donné, la vie continue. L’élève concerné continuera à apprendre et à progresser si les contenus sont récupérés encore, ou à oublier très certainement si les connaissances ne sont pas réinvesties.
Ces phénomènes liés aux contraintes cognitives de l’apprentissage font qu’une photographie prise à un moment donné, par le biais d’une évaluation unique, perd toute pertinence. Nous n’avons aucune idée de ce que l’élève connaissait quelque temps avant et connaitra quelque temps plus tard.
Lorsque nous n’évaluons les élèves qu’une fois, juste à la fin d’une unité de matière, nous testons ce que les élèves viennent tout juste d’apprendre. Nous pouvons les féliciter pour leurs bons résultats alors que tout était encore frais dans leur mémoire. Ces connaissances sont encore très sensibles à l’oubli. Le processus qui vise l’établissement d’un apprentissage en profondeur et durable est encore loin d’être terminé. Il ne s’agit encore à ce moment-là que de performances fugaces.
Le processus d’évaluation doit s’imbriquer au processus d’enseignement et d’apprentissage. Le retour d’information que l’enseignant récupère tout au long du processus à travers une évaluation formelle ou informelle doit avoir des conséquences directes et concrètes. Il se traduit dans l’adaptation de l’enseignement en classe et dans les démarches d’apprentissage autonome mobilisées par les élèves.
Si l’enseignant ne surveille pas l’évolution de l’apprentissage de ses élèves au fil du temps, rien ne lui permet de garantir qu’un apprentissage durable sera assuré avec une évaluation sommative unique au terme des apprentissages.
Nous pourrons toujours reprocher à un élève de n’étudier que dans la dernière ligne droite et d’oublier l’essentiel par la suite. C’est notre responsabilité de l’inscrire dans un cadre qui l’amène à adopter de fait un apprentissage distribué dans le temps. Nous mobilisons dès lors des opportunités de pratique de récupération, que nous mettons en scène dans le cadre de notre cours.
Si nous voulons soutenir l’apprentissage de nos élèves, nous n’avons pas d’autres solutions que de les évaluer plusieurs fois (de manière formelle et informelle), réparties dans le temps sur les mêmes contenus. C’est la répétition de performances similaires ou en progrès sur la maîtrise d’objectifs d’apprentissage définis qui permet d’assurer qu’un réel apprentissage se met en place.