Segmenter en privilégiant la réflexion et la charge cognitive des élèves
L’enseignement explicite part du simple vers le complexe en privilégiant la segmentation. Ses critiques utilisent ce principe pour établir qu’il est inadéquat pour les apprentissages riches, complexes et authentiques et se prête mieux à la mémorisation de connaissances.
Or, l’enseignement explicite s’adresse justement à la complexité. Il vise surtout à l’atteindre mieux et plus efficacement, en prenant en compte les limites de la cognition humaine.
L’apprentissage se produit grâce à l’exercice de notre pensée. La difficulté est que notre cerveau dispose d’une bande passante de largeur limitée pour penser (parfois appelée mémoire de travail ou charge cognitive). Nous ne pouvons penser qu’à un nombre réduit d’éléments nouveaux à un moment donné. Concrètement, nous pouvons retenir environ 7 éléments d’information nouvelle dans la mémoire de travail et traiter environ 3 à 4 éléments, le traitement consistant à combiner, à contraster ou à travailler sur les éléments.
Plus nous essayons de penser à un grand nombre d’éléments nouveaux ou disparates en même temps, plus la qualité de notre pensée se dégrade. De plus, une pensée de mauvaise qualité laissera moins de traces connectées en mémoire et réduira dès lors nos chances de faire durer l’apprentissage.
À la fois, la surcharge cognitive et le mode multitâche sont de mauvaises options pour apprendre à acquérir des connaissances ou à réfléchir en profondeur.
Notre cerveau est limité par le nombre d’éléments nouveaux auxquels nous pouvons utilement penser en même temps. Il subit également un retard et une perte de rendement chaque fois que nous passons d’une tâche à l’autre.
En maintenant le niveau de complexité des nouveaux contenus dans les limites de la mémoire de travail et en éliminant les changements distractifs inutiles, nous perdrons moins de temps de réflexion et d’apprentissages à long terme. La segmentation lors du traitement en mémoire de travail et l’intégration de ces connaissances par la suite avec nos connaissances préalables au sein de notre mémoire de travail est la voie d’accès idéale à la complexité.
Lorsque nous planifions un cours ou une activité, nous devons nous poser les questions suivantes :
Quels sont les éléments auxquels je veux que mes élèves réfléchissent en priorité à ce stade de l’apprentissage ?
Quels sont les contenus et tâches qui peuvent amener en toute certitude mes élèves vers la réflexion attendue ?
Comment m’assurer que la réflexion de mes élèves ne se dispersera pas dans plusieurs directions, certaines inutiles ?
Comment m’assurer que mes élèves pourront mener à bien leur réflexion dans les limites de leur mémoire de travail ?
Comment m’assurer que les contenus précédemment appris seront transférés et accessibles dans la mémoire à long terme de mes élèves ?
Une condition de base pour influencer positivement l’apprentissage est de toujours partir de ce que les élèves connaissent et construire à partir de là. Cela nous permettra de gérer plus aisément la charge cognitive et de constituer des apprentissages plus intégrés. Notre cerveau est une machine à fabriquer du sens. Les informations qui n’ont pas de sens pour nous et ne se raccrochent pas à nos connaissances antérieures seront rapidement abandonnées et oubliées.
Par conséquent, nous pouvons mieux ancrer la pensée de nos élèves :
En explorant ce que nos élèves connaissent déjà sur le thème abordé.
En utilisant leurs connaissances préalables comme point de départ pour concevoir le modelage et sélectionner les activités de la pratique guidée et autonome.
En découvrant ce qui les intéresse dans les contenus à apprendre et en l’utilisant pour créer un contexte significatif pour eux.
En les aidant à identifier les liens entre ce qu’ils apprennent de nouveau et ce qu’ils connaissent déjà.
La cartographie conceptuelle et les organisateurs graphiques peuvent être des outils précieux pour faciliter ces résultats.
Une fois que l’enseignant a développé cette vision d’ensemble, il peut la formaliser en rédigeant des objectifs d’apprentissage et s’engager dans un processus de planification à rebours.