Vigilance sans omniscience : la stratégie de l’accord partiel
Nous sommes occupés à donner des explications en classe entière ou à répondre à un élève individuel durant la pratique autonome. Soudainement, une perturbation mineure a lieu dans une autre partie de la classe que nous ne supervisions pas activement à ce moment-là.
Nous avons beau être vigilants, nous ne sommes pas omniscients. Nous n’avons pas tous les paramètres en tête pour avoir une certitude absolue sur l’étendue des différentes responsabilités en lien avec l’intervention qui s’impose maintenant. Qui a fait quoi, exactement ?
Néanmoins, même dans le doute, nous ne pouvons nous abstenir de réagir face à une perturbation et l’ignorer. Nous devons rester en mesure de modéliser et de soutenir le comportement que nous attendons de nos élèves.
Toutefois, modéliser le comportement des élèves et l’influencer positivement n’implique pas de toujours vouloir avoir le dernier mot et de retrouver le coupable.
L’accord partiel est une stratégie essentielle pour éviter ou résoudre préventivement les conflits. L’idée est que les enseignants ne doivent pas essayer systématiquement d’avoir le dernier mot, ou d’affirmer leur pouvoir dans une situation où un élève peut légitimement contester l’interprétation de l’enseignant. Nous ne devons pas risquer de commettre une injustice ou nous montrer hésitants ou fluctuants, car c’est la base de l’incohérence.
Voici différents exemples de mise en œuvre de l’accord partiel :
Exemple 1 :
Élève : « Ce n’est pas moi qui parlais, je faisais mon travail ».
Enseignant : « OK, peut-être que c’était le cas, mais maintenant je veux que tu continues ton travail pour terminer la tâche, comme tout le monde, merci. »
Exemple 2 :
Élève : « Ce n’est pas moi qui ai lancé la boulette de papier… ce n’est pas la mienne… je n’ai rien fait »
Enseignant : « Peut-être pas, mais nous sommes tous en accord sur les règles à ce sujet et sur ce qui est attendu. N’est-ce pas… [s’adressant maintenant à l’ensemble de la classe] J’aimerais que vous m’aidiez tous à éviter que ça ne se reproduise la prochaine fois, merci. »
En agissant de la sorte, l’enseignant met l’accent sur le rappel et le renforcement du comportement attendu. Il offre aux élèves le bénéfice du doute, du temps et un choix sur les conséquences si l’évènement se reproduit.
L’objectif de l’enseignant n’est pas tant de sanctionner l’infraction au comportement observé que d’influencer le comportement des élèves à moyen terme. Il est essentiel de s’attendre à ce que les élèves respectent les règles, mais nous ne devons pas considérer le fait de ne pas trouver de responsables, en cas de doute, comme un signe de faiblesse. Être injuste aurait des conséquences autrement néfastes.
Communiquer aux élèves que malgré notre vigilance, nous pouvons nous tromper est un élément important pour maintenir les relations tout en conservant notre autorité.
Il faut accepter de parfois céder un peu de terrain lorsque nous visons une efficacité à moyen et long terme.